Le MERCOSUR

Sans qu’il ait pu être discuté et renégocié le MERCOSUR, accord commercial tel que prévu en 2019,  risque d’être signé dès cet été 2023  par  les membres de la Commission européenne et les représentants des pays d’Amérique Latine. Ce manque de transparence, cette volonté de signature rapide sont inadmissibles !

Depuis 2019, ce projet d’accord avait été gelé en raison de la mobilisation de la société civile dénonçant les conséquences de l’accord tant sur le plan écologique et social, qu’en termes de violations des droits humains, ainsi qu’en raison de la situation politique au Brésil.

La Commission européenne et plusieurs États-membres de l’UE souhaitent profiter de l’élection de Lula au Brésil pour le ressusciter sans rouvrir des négociations sur son contenu initial. Elle espère engager le processus de ratification grâce simplement à l’ajout d’un document annexé dont le contenu reste secret. En effet, ni le Parlement européen et encore moins les Parlements nationaux, n’ont pu y avoir accès. C’est le retour des pires pratiques qui avaient prévalu aux négociations sur le TAFTA (UE-États-Unis) dans les années 2010 que la Commission s’était engagée à ne plus reproduire.

Initiée par divers mouvements opposés déjà à la promulgation des précédents traités, une rapide montée en puissance s’engage pour stopper le processus de signature rapide « en catimini » et obtenir la transparence sur le contenu du document annexe. Cet « instrument conjoint » ne modifie en rien le contenu de l’accord UE-Mercosur et ne crée aucune obligation nouvelle, ni aucun mécanisme ayant une force exécutoire capable de résoudre les problèmes soulevés par cet accord. L’économie générale de l’accord reste totalement inchangée. Il ne comprend rien de nouveau sur le volet agricole, pourtant l’un des plus critiqués de l’accord.

Pour les organisations de la société civile des deux côtés de l’Atlantique, c’est  un modèle commercial qui sert uniquement les intérêts des entreprises multinationales au détriment de conditions de travail décentes. Il conduit à un accroissement des inégalités sociales au lieu de mettre sur pied des règles et politiques publiques en mesure de favoriser une relocalisation écologique et solidaire au sein de chaque pays. Au lieu d’une concurrence accrue, les membres de la société civile de l’UE et de l’Amérique latine se mobilisent pour exiger l’abandon de ces accords et l’ouverture d’une nouvelle ère.

Il s’agit de faire face avec les citoyens concernés aux défis majeurs de notre époque : la crise climatique, la perte massive de biodiversité, l’augmentation de la pauvreté, du chômage et de la faim et l’escalade des conflits géopolitiques.

Le président Lula quant à lui, estimant l’accord déséquilibré et trop favorable à l’Union Européenne, entend bloquer le processus de signature rapide pour obtenir des modifications sur le sujet, notamment, des marchés publics.

17-18 juillet 2023 à Bruxelles – Sommet UE-CELAC

(Union Européenne –  Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes)

Les chefs de gouvernement de ces différents pays se réunissent pour discuter et « progresser » en vue de signer des accords commerciaux dont notamment le MERCOSUR, sans modifier la précédente version 2019 mais en y ajoutant un « instrument conjoint » tenant compte de quelques exigences émises par les pays d’Amérique Latine concernés.

Initiatives de la société civile

Le 17 juillet 2023 les représentants de la société civile, des deux côtés de l’Atlantique, assistent au parlement européen à la conférence co-organisée par des eurodéputés des Verts/ALE, de la Gauche, du S&D et par plus de 50 organisations de la société civile d’Amérique latine et de l’UE   “Une nouvelle relation commerciale entre l’UE et l’Amérique latine au 21ème siècle”

L’objectif est d’évaluer les leçons tirées de plus de 20 ans d’accords commerciaux, de s’opposer fermement à la signature en l’état d’un accord obsolète via « l’instrument conjoint » c’est à dire un document dont le contenu  reste secret, ce qui augure d’une aggravation des prédations de matières dites de faible valeur ajoutée par les multinationales, européennes en l’occurrence, au détriment du développement promis aux pays concernés.

Le 18 juillet 2023, préparation d’une déclaration commune de la société civile

Déclaration appelant les chefs d’État et de gouvernement à se saisir du sommet UE-CELAC pour élaborer des relations transatlantiques qui contribuent à la construction de sociétés socialement justes et écologiquement, fondées sur les principes de la démocratie, de la solidarité, de la protection des droits de l’homme, des droits du travail et du respect des limites planétaires.

Premiers échos

Les témoignages ont été unanimes pour dénoncer la violation généralisée des droits des populations autochtones, les conséquences environnementales catastrophiques liées aux prédations minières et l’aggravation continue des déséquilibres  économiques entre l’Europe et les pays spoliés.

Il s’agit dorénavant de définir des relations commerciales respectueuses des droits humains et de l’environnement et de permettre le plus rapidement possible le retour à la souveraine alimentaire  et, enfin, le développement des industries locales.

Une très forte mobilisation des citoyens ici/là-bas et  une pression renouvelée sur les représentants des divers parlements de tous les pays européens même durant l’été s’imposent pour retarder les échéances et permettre l’ouverture de discussions à l’automne prochain en toute connaissance de cause.

Nous faisons partie du collectif STOP CETA MERCOSUR et entendons suivre de très près l’évolution des discussions au niveau de la Commission et celle des dispositifs mis en œuvre par l’ensemble des opposants.

La déclaration commune des représentants de la société civile sera publiée sur notre site dès sa parution.

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site du collectif Stop CETA-Mercosur
stop ceta

Mercosur, quelques repères…

Première signature en 2004 d’un accord de libéralisation du commerce caractéristique du capitalisme néo-commercial entre l’UE et les pays du Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay, Paraguay et Chili)

L’OMC, organisation mondiale du commerce, créée le 1er janvier 1995, est la seule organisation internationale à vocation mondiale qui s’occupe des règles régissant le commerce entre les pays. Elle administre un système mondial de règles commerciales, sert de cadre pour la négociation d’accords commerciaux et règle les différends commerciaux entre ses membres via l’ORD, Organe de Règlement des différends, sous sa tutelle, si une plainte est déposée pour violation des accords de l’OMC ou un manquement aux obligations.

Rappels historiques

Le TAFTA  (Transatlantic Free Trade Area), plus commodément désigné comme Grand Marché Transatlantique (GMT).

2013 : dès juillet débutent les premières négociations entre l’Union Européenne et les États Unis pour préparer un accord commercial très ambitieux. Objectif « la libéralisation progressive et réciproque du commerce et de l’investissement en biens et services avec l’élimination des obstacles réglementaires inutiles.

Entre autres, graves conséquences pour l’ensemble des européens :

  • la destruction des normes écologiques et sociales : droit du travail, protection sociale, place des services publics, normes environnementales, alimentaires, développement des OGM, extraction de gaz de schiste…
  • mise en place, conformément aux vœux des multinationales de tribunaux privés sous l’égide de l’OMC  – Organisation Mondiale du Commerce – pour infliger de lourdes amendes aux pays, collectivités, entreprises qui ne se soumettraient pas aux nouvelles règles imposées.
  • Opacité totale, aucun débat démocratique

Le 15 juillet 2014, à la suite d’une pétition ayant obtenu plus d’un million de voix, comme les textes l’exigent, une initiative citoyenne européenne a été lancée par le Collectif Stop TAFTA, réunissant 230 mouvements citoyens de 21 pays.

En 2016, les oppositions restent vives, ce traité étant qualifié de piège transatlantique, le libre échange étant qualifié de déferlante, de typhon menaçant les européens. Néanmoins il est difficile de connaître de quelle manière il a été finalement ratifié et quelles sont les modifications successives à ce jour.

Le CETA (Comprehensive Economic and Trade) : traité de libre échange entre l’Union Européenne et le Canada a été signé le 30 octobre 2016 et est entré en vigueur provisoirement le 21 septembre 2017 après 8 ans de négociations. Il a été approuvé par l’assemblée nationale française le 23 juillet 2019 malgré de très vives contestations. 13 pays l’ont ratifié à cette date sur 28 : le processus s’avèrant de longue haleine, sur insistance du Canada, la majorité des dispositions sont déjà applicables, à l’exception des très controversés tribunaux d’arbitrage pour trancher les différents entre les entreprises et les États.

Il s’agit d’un traité très technique : les nouvelles règles concernent notamment l’agriculture. Ainsi, le Canada et l’UE pourront tous deux exporter davantage de produits sans droits de douanes et les marchés publics seront davantage ouverts. A l’inverse, d’autres secteurs sont exclus du traité : c’est le cas, notamment, de l’audiovisuel, au nom de « l’exception culturelle ».